Solar Cookers International Network (Home)

 

(Article présenté au colloque sur la cuisson solaire organisé par l’UNESCO. Varese, oct. 1999.)

Les Cuiseurs Solaires à Panneaux Réfléchissants

ASPECTS TECHNIQUES

par Roger BERNARD, ex - Maître de Conférences à l'Université Lyon 1

Un système de cuisson solaire comprend, au minimum, un cuiseur et un récipient. Mais alors que l'on fabrique et que l'on vend des cuiseurs solaires de toutes sortes, il n'existe actuellement, sur le marché, aucun récipient solaire, c'est à dire qui soit spécialement conçu pour utiliser au mieux ce type d'énergie.

En conséquence, il semble important de développer maintenant, parallèlement à des cuiseurs très simples, des récipients solaires suffisamment performants et commodes pour que la cuisson solaire soit plus largement acceptée par ses utilisateurs potentiels.

I - Le cuiseur

Le cuiseur à panneaux réfléchissants (panel cooker) fut imaginé en 1993 pour répondre à une demande pédagogique. Il s'agissait de concevoir un appareil de cuisson assez simple pour que des enfants de dix ans puissent le construire en moins d'une heure, à partir de matériaux courants et peu coûteux. On est parti d'une boîte en carton que l'on a découpée et revêtue de feuilles d'aluminium pour que ses cinq faces réfléchissent les rayons du Soleil sur une popote de camping. Pour réduire les pertes thermiques de ce récipient, on le recouvrait d'un saladier en verre jouant le rôle d’une serre (1).

Barbara Kerr, aux Etats-Unis, proposa, pour ce nouveau cuiseur, une forme un peu différente qui permettait un meilleur pliage et elle remplaça le saladier par un sac en plastique transparent résistant à la chaleur. Le cuiseur "panel" (comme elle le baptisa) devenait ainsi léger et peu encombrant, donc facile à transporter dans un sac à dos (2).

En vue de son application dans les pays tropicaux, l'association américaine "Solar Cookers International" (SCI) développa alors un cuiseur panel plus grand, comportant sept panneaux réfléchissants, dont cinq sont inclinés vers l'arrière pour mieux capter les rayons du Soleil au zénith : le "CooKit". Initialement importé des Etats-Unis, puis fabriqué aussi au Kenya, il est maintenant utilisé par des milliers de familles de réfugiés grâce à SCI qui a organisé, dans plusieurs camps, des stages de formation pour les femmes désirant apprendre à cuisiner sans brûler de bois (3).

Avec le CooKit, on a accru la concentration du rayonnement solaire en augmentant le nombre des panneaux réfléchissants. On peut aussi jouer sur cette concentration en utilisant les réflexions multiples qui s'effectuent entre deux panneaux contigus, comme dans un kaléidoscope. Ainsi, avec une marmite placée entre deux panneaux verticaux faisant entre eux un angle de A degrés, le Soleil "voit" 360 / A marmites (et autant de marmites à l'envers par réflexion des précédentes dans la base horizontale). La figure 1 montre le cas où A = 72°.

Il s'agit d'une version pliable d'un cuiseur que j'avais proposé précédemment sous le nom de "Reflective Open Box" (4). Ici, l'ensemble des deux panneaux verticaux se referme comme un livre et le panneau frontal se replie sous la base. On obtient ainsi un concentrateur très simple à fabriquer, à plier et à ranger, et qui a donné satisfaction au cours de nombreux essais réalisés à des latitudes moyennes (voisines de 45°).

Toutefois, on peut se demander si un tel cuiseur fonctionnerait suffisamment bien dans les régions de faibles latitudes car les panneaux verticaux reçoivent de moins en moins de rayons solaires à mesure que le Soleil monte plus haut dans le ciel. L'expérience reste à faire sur le terrain mais certaines considérations théoriques permettent d'être optimiste à ce sujet. En admettant que le cuiseur fonctionne correctement tant que la hauteur du Soleil reste inférieure à 70°, puis qu'il travaille au ralenti pour des hauteurs plus grandes (grâce à son panneau frontal), il est intéressant de calculer pendant combien de temps la hauteur du Soleil reste supérieure à 70° chaque jour de l'année en un lieu donné.

On trouve qu’à l'équateur, pendant un peu plus d'un jour sur trois, la hauteur du Soleil n'atteint pas 70° (Par exemple, le 21 juin à midi, le Soleil monte un peu moins haut à l'équateur qu'à Varese). Dans une année entière, le Soleil reste au dessus de 70° pendant 474 heures, soit moins de 11% du temps total qu'il passe au dessus de l'horizon. Ce pourcentage s'élève au maximum à 12,2 % pour les régions de latitudes voisines de 8°, puis diminue jusqu'à 9 % aux tropiques, pour s'annuler aux latitudes supérieures à 43,5°.

De plus, comme cette hauteur critique n'est atteinte au plus tôt que vers 10 h 40, le cuiseur ne fonctionne au ralenti qu'en fin de matinée, ce qui n'est guère gênant puisque c'est au début de la cuisson que l'on a le plus besoin de puissance,

II - Le récipient

La plupart de nos récipients habituels ont été conçus pour être posés sur une source de chaleur et non pour recevoir une énergie rayonnante qui, dans le cas des cuiseurs panels et de plusieurs autres, leur arrive de tous côtés, et en particulier par le haut.

Pour les aliments faciles à cuire et dans d'excellentes conditions météorologiques, le problème n'est pas grave car presque n'importe quel récipient peut faire l'affaire. Il suffit de le placer au centre du cuiseur, sans précaution spéciale, comme sur la figure l. Mais, dans la majorité des cas, on doit protéger le récipient contre le refroidissement dû à la convection de l'air qui l'entoure et contre la perte de son propre rayonnement. Comme on l’a vu, on a utilisé pour cela un saladier ou un sac en plastique. Mais l'amélioration sensible des performances ainsi obtenues se paie par deux inconvénients. D'une part, la vapeur émise par les aliments chauffés se condense à l'intérieur de l'enveloppe transparente et l'eau de condensation peut y poser quelques problèmes. D'autre part, l'accès aux aliments n'est pas facile pour le cuisinier qui désire les voir ou les remuer en cours de cuisson.

Malgré ces défauts, le sac en plastique a permis de dépanner de nombreux réfugiés privés de combustible pour faire cuire leur nourriture. Mais si cette solution est bien acceptée par des gens placés dans une situation d'extrême dénuement, il n'en sera pas forcément de même avec les habitants d'un village normal qui, à juste titre, pourront se montrer plus exigeants sur la commodité des appareils qu'on leur propose.

Pour éliminer les deux inconvénients cités précédemment, on peut laisser à nu le couvercle du récipient et n'appliquer la protection transparente qu'à sa partie inférieure, ainsi que je l'ai suggéré en 1994 (4). Depuis cette date, les expériences ont confirmé que les pertes thermiques occasionnées par un tel dispositif se trouvaient compensées par une meilleure isolation du fond de la marmite. De plus, l'emploi d'un couvercle transparent a le double avantage de laisser rentrer la lumière du Soleil dans le récipient et de permettre l'observation des aliments sans ouvrir celui-ci, donc sans perte de chaleur supplémentaire.

Dans un ouvrage récent, destiné au grand public (5) j'ai expliqué comment on peut mettre ces idées en pratique et réaliser un récipient solaire approximatif en utilisant deux cocottes dont l'une, en métal noir, vient se placer dans l'autre, en pyrex (figure 2). Une rondelle en carton maintient le fond de la première un peu au dessus du fond de la seconde et ferme l'espace-serre qui protège la marmite intérieure du refroidissement.

Bien entendu, il ne s'agit là que d'un "bricolage" provisoire, obtenu avec des éléments que l'on trouve actuellement dans le commerce. Mais, malgré ses défauts évidents, il permet cependant de réaliser des performances au moins aussi bonnes qu'au moyen des dispositifs précédents, avec la commodité en plus.

On fera encore mieux avec le véritable récipient solaire qui sortira peut-être des usines au siècle prochain. La rondelle en carton ne sera plus nécessaire car les deux cocottes seront dessinées pour s'adapter parfaitement l'une à l'autre et leur fabrication en série abaissera considérablement le prix du récipient solaire.

D. Delaney, au Canada, a lancé quelques idées très intéressantes à ce sujet (6).

REFERENCES

(1) Bernard R. - Maybe you don't need Such a Big Cooker ? (Titre changé par l'éditeur en : "The Bernard Solar Panel Cooker"). Solar Box Journal, 16 (feb. 1994)(2) Kerr B. - Barbara Kerr tests the Solar Panel Cooker. Ibidem.
(3) Blum B. - Dissemination of Solar Cooking in Areas of Acute Fuel Shortage. Séminaire du Programme des Nations Unies pour l’Environnement. Nairobi (1995).
(4) Bernard R. - Improving the Solar Panel Cooker. Solar Box Journal, 18 (oct. 1994).
(5) Bernard R. -La Cuisson Solaire Facile. Ed. Jouvence et Ed. Silence (1999).
(6) Delaney D. - A Pot with Integrated Greenhouse for Solar Panel Cooking (1999) (ddelaney@sympatico.ca).

Cet article a été présenté au Colloque sur la cuisson solaire organisé par l’UNESCO à Varese en octobre 1999.

 

This document is published on The Solar Cooking Archive at http://solarcooking.org/francais/panel-tech-fr.htm. For questions or comments, contact webmaster@solarcooking.org