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La Crise du Bois de Chauffe au Burkina  Faso

Les Cuiseurs Solaires comme Alternative  

Paul Krämer

 

Mais la plupart des gens ne se rendent pas compte que, dans quelques régions, bientôt les options restantes pour préparer un repas chaud pourraient être réduites à peu de choses en dehors des cuiseurs solaires (Kuhnke et al. 1990).

 

Résumé.

Plus de 90% du bois utilisé au Burkina Faso sert de bois de chauffe. La consommation dans les ménages est plus importante en milieu urbain qu’en milieu rural. Dans ces conditions, l’urbanisation rapide conduira à une déforestation accélérée, étant donné que les réserves de bois sont surexploités depuis longtemps. Les formes d’énergie importées  ne sont pas une alternative envisageable pour des raisons économiques. Vu les coûts importants et encore croissants du bois et d’autres formes d’énergie, le lien du problème de l’énergie avec le problème de la pauvreté est évident. Dans un contexte de mondialisa­tion et d’urbanisation, les rapports entre la croissance du secteur moderne et d’appauvrissement de la population, les rapports entre l’acceptation des cuiseurs solaires et le milieu socio-économique sont discutés, ainsi que la possibilité de solutions hybrides à l’échelle locale. 

Summary.

More than  90 % of  the wood cut in Burkina Faso is used as fuel. Consumption is big­ger in urban than in rural households. Under these conditions, rapid urbanization will lead to accelerated deforestation, the more so as the wood reserves have been overex­ploited for a considerable time. Imported forms of energy are not an alternative for eco­nomic reasons. Because of high and rising costs of wood and other forms of household fuel the link with the problem of poverty is obvious. In the context of globalization and urbanization, modern sector growth and increasing poverty, the relation between ac­ceptance of solar cookers and socio-economic standing is discussed, as is the possibility of hybrid solutions at the local level.

Zusammenfassung.

Über 90 % des eingeschlagenen Holzes dienen in Burkina Faso als Feuer­holz für Koch­zwecke. Der Verbrauch ist in städtischen bzw. halbstädti­schen Haushalten höher als in ländlichen. Unter diesen Umständen lässt die rasche Verstädterung für die Zukunft eine weiter beschleunigte Entwaldung erwarten, da die Holzvorräte bereits seil längerer Zeit übernutzt sind. Im­portierte Energieformen können aus wirtschaftlichen Gründen keine brei­tenwirksame Alternative sein. Angesichts der hohen und steigenden Kosten für Holz – und andere Energie­formen – ist der Zusammenhang mit dem Problem der Verarmung breiter Bevölkerungskreise offensichtlich. Im Kontext von  Globalisierung und Ver­städterung, Wachstum des modernen Sektors und Verarmung wird die Beziehung zwi­schen der Akzeptanz von Solarkochern und dem sozial-ökonomischem Milieu ange­sprochen

Introduction.

Burkina Faso se trouve, comme beaucoup de pays d’Afrique – et particulièrement de la zone Soudano-Sahélienne – dans une crise d’approvisionnement de bois de chauffe pour les ménages.   Plus de 90 % de l’énergie consommée dans les ménages concerne le bois ou ses dérivés comme le charbon de bois. La consommation dépasse l’accroissement an­nuel en biomasse ligneuse. La durabilité écologique fait défaut. En même temps – à cause des coûts prohibitifs – les sources d’énergies importées n’entrent pas en considération, aussi bien au niveau macro-économique – à cause du déficit permanent[1] dans la balance commerciale – qu’au niveau micro-économique (des ménages). Ainsi, une bouteille de gaz de 20 kg coûte 20.000 FCFA à Ouagadougou, et chaque nouveau remplissage, qui représente un approvisionnement  pour trois semaines en moyenne, encore 4.000 FCFA. Cela signifie 72.000 FCFA par an seulement pour les rem­plissages.  D’autre part, le seuil de pauvreté, au dessous duquel vit 45 % de la population, a été fixé à 72.690 FCFA/an. Il est clair que la durabilité économique des formes d’énergie commerciales en remplacement du bois n’existe pas.   

J.-P. Minvielle se demande dans son livre « La question énergétique au Sa­hel » [1999: 127]: « Ne courra-t-on pas alors le risque d’être, dans un ave­nir pas si lointain, confronté à la nécessité de mettre en place des systèmes d’aide énergétique du même type que les systèmes d’aide alimentaire ? En bref : la famine énergétique est-elle pour demain? »   Ici il faut rappeler également le fait que, selon Jean Gorse [1985], chef d’un groupe de travail de la Banque Mondiale sur la désertification en Afrique Occidentale, les capacités naturelles en ce qui concerne la production de bois sont bien plus réduites comparées à celles de la production alimentaire.  Surtout, ces li­mites ont été dépassées depuis longtemps. D’après A. Compaoré et J. Ka­boré [1999] 46 % de la surface du pays sont écologiquement dégradés, aussi bien par les interventions humaines que par le processus de désertifi­cation[2]. L’exemple du Niger montre combien la production et la consomma­tion de bois peuvent s’écarter l’un de l’autre : une consomma­tion de 2.293.398 tonnes s’oppose à une production officielle de 910.759 tonnes, d’où un déficit de 60%, couvert probablement par la coupe préda­trice et illégale.

Dans ce qui suit je vais essayer de montrer comment, au Burkina Faso, la demande en bois de chauffe pourrait être diminuée par l’utilisation de cui­seurs solaires, rapprochant au moins l’écart entre la demande et une coupe de bois durablement possible. 

Comment la balance entre le taux d’accroissement de bois et la consommation a-t-elle été dérangée ?

Celui qui voyage dans les pays du Sahel ne manquera pas de remarquer les tas de bois à coté de la route ainsi que les camions chargés de bois trans­portant leurs charges vers les villes. Le fait que le bois est collecté voire coupé à la campagne ne doit pas faire oublier que la consommation se fait surtout dans les villes, avec une tendance croissante. Les villes, tant qu’il y en avait au temps pré-colonial et colonial, étaient probablement toujours de grand consommateurs de bois. Les ruines de Ouara, l’ancienne capitale du royaume du Ouaddaï au Tchad, se trouvent entourées de désert. Mais le fait que la ville a été partiellement construite en briques cuites – p.e. la mos­quée d’Abd-el-Kerîm, les fortifications et les tours – prouve qu’ici le désert n’était pas présent depuis toujours. Les briqueteries utilisaient le bois comme combustible, il n’y en avait pas d’autre. Au temps de la fondation de la ville, Ouara aurait été entouré de brousse impénétrable. En 1870, lors de la visite du chercheur allemand Gustav Nachtigall [1879-81 et 1967, S.77-78], il ne restait que quelques rares habitants à Ouara, aujourd’hui il n’y a plus personne. La capitale avait été transférée à Abéché vers 1850. Des démons malveillants auraient rendu le château royal inhabitable, tel aurait été le motif officiel selon Nachtigall. Cette formule, signifierait-elle en fait, en termes voilés, le contre-coup de la nature ? On peut supposer que la déforestation et la désertification a eu quelque chose a voir avec la consommation de bois, au moins dans les environs de Ouara. De nos jours, pareille chose se passe aux environs de N’Djamena[3] et d’autres villes de la zone du Sahel et de la Savane.

Urbanisation et consommation de bois

Avec la modernisation, l’urbanisation dans les pays du Sahel s’est intensi­fiée. D’après un nouveau rapport de l’organisation « Habitat » des Nations Unies  [UNCHS 2001] il y aurait un lien entre l’urbanisation et la mondia­lisation: « Le rapport établit une relation de symbiose entre mondialisation et urbanisation: les caractéristiques des villes aident à modeler – et à pro­mouvoir – la mondialisation ».

La demande de bois de chauffe de la part des villes a beaucoup augmenté, et continuera à monter. D’autre part, durant la période allant de 1980 à 1990, la perte annuelle de surfaces boisées au Burkina Faso se serait éle­vée, d’après  la Banque Mondiale, à 80.000 –100.000 ha[4]. Au Mali, qui compte environ le même montant de population et où les conditions de vie et d’écologie sont comparables, on note une consommation de 6,5 millions de tonnes en 2000, correspondant à 1,5 kg par jour et par personne; ceci correspondrait à 464.285 ha de forêt[5].

Pour le Burkina la FAO mentionne une perte annuelle de 15.266 ha, correspondant à 0,2 % des surfaces boisées. Une autre source assume une perte de 0,7 %[6]. Dans ce chiffre, les pertes dues au feu de brousse et à la coupe du bois de chauffe ne sont pas comprises, mais seulement les surfaces défrichées pour d’autres utilisations (pour faire des champs par exemple). Les statistiques sont difficiles à comparer, étant donné qu’il s’agit de différents types de forêts.

Le degré d’urbanisation est estimé par la Banque Mondiale (Burkina Faso Country Profile) à 18 %, par le bureau américain « Population Reference Bureau » à 15 %, mais par l’étude WALTPS de OCDE à 25 % déjà pour l’année 1990  [OECD 1998, S. 133]. Ces différences sont apparemment dues à des définitions divergentes de ce qui constitue une ville. Le docu­ment „La Politique des Villes au Burkina Faso“ [Février 1995] considère des agglomérations dépassant 10.000 habitants comme villes, à conditions d’avoir des infrastructures définies. Cour et Snrech par contre, dans leur étude des « Perspectives de l’Afrique Occidentale à Long Terme » [WALTPS, 1998], considèrent  les agglomérations de plus de 5.000 habi­tants comme villes. Pour la période allant de 1990 à 2020 ces auteurs comptent avec un accroissement annuel de la population  totale du Burkina de 2,13 %, de la population urbaine de 4,28 %, et de la population rurale de 1,14 %.

Dans ces conditions, la population totale du Burkina Faso en l’an 2020 de­vrait s’élever 16,3 millions, la population urbaine à 6.872.000 personnes, correspondant à un degré d’urbanisation de 42 %. Pour la région de l’Afrique occidentale prise ensemble, ce degré serait même  près de 60 %. En 1960 encore, seulement 14 % vivaient dans les villes (données du „Conseil Économique et So­cial[7], Bobo-Dioulasso, 21-23 février 1995, basé sur les résultats de l’étude WALTPS).

D’une manière générale, on peut admettre que la population rurale s’approvisionne en bois et fournisse les villes en même temps, et que les citadins soient acheteurs, dépendant du marché. Le montant critique d’une population locale qui conditionne le passage à la dépendance du marché de bois, ne coïncide probablement pas avec les définitions officielles de ‘ville’, et pourrait être largement en dessous de 5.000 personnes. 

Pour cette raison, il semble être prudent de grouper les agglomérations majeures, même si elles ne sont pas reconnues comme villes, avec ces der­nières pour mieux cerner la demande de bois aux marchés. Cette exigence est remplie, partiellement au moins, par les chiffres du „World Gazetteer 2001“ („cities and places“, voir tableau à la fin de l’article). 

Avec l’urbanisation, la part du charbon de bois dans les combustibles utili­sés augmente d’une manière générale. Un document de la FAO[8] dit en substance:  « Tandis que, traditionnellement, le bois de chauffe représentait la plus grande partie des combustibles dérivés du bois, les changements économiques et sociaux associés à l’urbanisation conduiront à ce que le bois soit relayé progressivement par le charbon de bois, augmentant ainsi l’importance de celui-ci dans les domaines énergétique, environnemental, économique et social ». 

Les différences dans les taux d’accroissement de la population sont surtout conditionnées par les migrations internes: Fofack, Monga und Tuluy [2001] donnent une explication pour ces migrations de la campagne à la ville: « C’est surtout, parce-que la migration de la population traditionnelle ru­rale, très pauvre,  vers les villes, semble motivée par la recherche de plus de chances dans les villes, même si c’est à plus longue échéance ».

Dans les campagnes du Burkina ce sont surtout les femmes qui ramassent le bois, le portent au village ou au bord de la route et le vendent au marché, d’où il est transporté par camions vers les villes.

La population a besoin de ces maigres revenus pour acheter du pétrole pour les lampes, des allumettes, du sel, du poisson séché et d’autres ustensiles. Pour la collecte du bois les femmes sont obligées d’acquérir une licence, qui actuellement coûte 600 FCFA (environ 1 Euro). Ceci semble bien in­tentionné, mais, socialement, c’est une catastrophe et a très probablement un effet contre-productif. Supposons une femme qui vendrait deux fagots à 600 FCFA, obtenant ainsi 1.200 FCFA par mois. Pour couvrir le coût de la licence, elle devra vendre trois fagots à la place de deux, pour arriver au même revenu net.

Ce qui est plus grave, la population a l’impression que, par le moyen de la licence et la défense de couper le bois vert, la bureaucratie de l’état entend lui retirer les droits d’usufruit des forêts et des réserves de bois pour les ré­clamer pour elle-même. Dans ces conditions, une participation de la popu­lation aux campagnes de plantation d’arbres et à la protection de ces plan­tations semble peu probable. Par contre, une mobilisation des gens pour la plantation d’arbres en marge des surfaces agricoles semble plus promet­teuse[9]. Parfois un parle de « sylvieculture sociale » [z.B. Chazine 1985], ou de « foresterie communautaire » dans ce contexte. La notion de « forest farming » entre dans la même optique.

La population rurale elle-même consomme peu de bois. A la différences des citadines, les femmes rurales ne font la cuisine qu’une fois par jour. En dehors du bois, elles emploient aussi des tiges de mil et de maïs.  Pour la consommation plus importante de bois dans les villes les facteurs suivants entrent en jeu:

·        Des pièces de bois de longueur et diamètre plus  importants.

·        Une part importante de charbon de bois, préféré à cause du transport plus facile et le peu de fumée qu’il provoque. Mais le produit fini ne contient que 40 % de l’énergie contenue dans le bois, pourvu que la technique soit bonne. Si ce n’est pas le cas, le rendement diminue, comme au Burkina Faso[10], où il serait seulement de 11 %, contre 18 % au Sénégal. Ceci serait dû au fait qu’au Burkina Faso, la produc­tion de charbon de bois est défendue et serait donc faite en cachette en utilisant une mauvaise technique.

·        Le fait que la population urbaine a partiellement assumé les habitudes européennes d’alimentation avec trois repas par jour. Ceci implique l’allumage d’un feu trois fois par jour, tandis que, à la cam­pagne, on ne mange qu’une seule fois.

·        La part importante de la population urbaine dans l’accroissement de la population totale. La population urbaine croît presque quatre fois plus vite (taux : 4,28 % par an)  que la population rurale (1,14%), et deux fois plus vite que la population totale (2,13 %).

Mais, comme le note J. P. Minvielle dans son livre, « la consommation des ménages urbains est à la fois la plus préoccupante et celle, sur laquelle il apparaît le plus facile d’intervenir » [J.-P. Minvielle 1999, 144]. Les rai­sons sont les suivantes:

La populations urbaine/semi-urbaine compte moins d’analphabètes que la population rurale. En 1998 le degré d’alphabétisation dans les villes s’élevait à 50,6 % (59,9 chez les hommes et 42,0 chez les femmes); dans la campagne ce degré serait de 10,8 % (15,6 chez les hommes et 6,8 chez les femmes).

·        La population des villes est obligée d’acheter le bois ou le charbon de bois, donc sent la montée des prix et est plus prête à envisager des alternatives énergétiques au bois. A Gaoua p.e. un fagot de 20 kg en­viron coûte 600 FCFA. « En tout cas, le bois représente  une part considérable du budget familial. Un employé qui soutient une grande famille à Ouagadougou dépense facilement un tiers de son revenu pour le bois de chauffe »   [Jacqueline Ki-Zerbo, “Women and the energy crisis in the Sahel” (Les femmes et la crise d’énergie), Una­sylva, 1985, 133]. Cette situation n’a presque pas changé depuis.[11]

·        La population des villes dispose plus souvent que celle de la campagne d’un revenu permettant un investissement. 16,5 % seulement de la population urbaine est considérée comme pauvre, contre 51 %à la campagne. La pauvreté est rurale à 94 %, mais elle s’accroît également dans les villes [Fofack, Monga und Tuluy 2001]. 

·        Le service après-vente est plus facile dans la ville à cause de la concentration des habitations..

·        Les familles en ville emploient souvent des membres féminins de leurs famille originaires de la campagne pour aider au ménage, tandis que la maîtresse de maison travaille dans une entreprise ou un bureau, ce qui fait qu’il est possible de faire la cuisine dans la journée quand le soleil est haut.

Les cuiseurs solaires comme alternatives:

Un atelier sur « les sources d’énergies renouvelables et les écotechnologies dans la lutte contre la désertification » à Tunis en 1998 énumérait les avantages de l’utilisation du thermique solaire et tirait la conclusion sui­vante:

« Par ailleurs, le solaire thermique au travers du cuiseur solaire et du chauffe-eau solaire dispose d’énormes atouts potentiels dans la lutte contre la désertification, mais compte tenu des obstacles d’ordre technique, sa dif­fusion massive se fera sous des conditions d’amélioration de ses perfor­mances et d’adaptations locales pour les rendre plus utiles et plus accessi­bles. Les cuiseurs conçus jusque là  ne sont pas exempts de critique de la part des utilisateurs : lenteur de cuisson, inadaptabilité aux habitudes culi­naires des populations de certaines zones, etc. ».

De cette constatation certainement juste,  mais trop générale, on ne doit pas déduire des conclusions en ce qui concerne un type particulier de cuiseur. Par contre, il faut davantage différencier. Personne ne songerait à émettre des opinions sur les mérites de camions ou  d‘avions en général, sans tenir compte de la marque, du producteur et du profil des exigences.

Bien que la cuisson solaire, sous certaines conditions, présente une alterna­tive aux dilemmes écologique et socio-économique de nombre de pays du Sud, on en parle en Allemagne souvent sur un ton ridiculisant et péjoratif, voir Hankins [1996] et Sauer [2000]. La chaîne d’argumentation semble être la suivante : Les cuiseurs solaires ne valent rien, et s’ils valent quelque chose, ils ne sont pas acceptés par la population, et s’il sont acceptés, il s’agit d’un cas particulier, à partir duquel on ne doit pas généraliser.

Comme règle générale, on considère les ruraux comme la population cible. Le fait que les cuiseurs sont encore peu répandus est expliqué selon l’hypothèse du traditionalisme des  populations rurales et attribué à des causes « appartenant moins au domaine technique, mais plutôt au domaine socioculturel, socioéconomique et psychosocial » [Kruhnke et al. 1990, 116], Sauer [2000, 3, 25]. Mais, selon l’ethnologue berlinois Elwert [1983], l’hypothèse du traditionalisme n’est qu’une lampe pour éclairer une fausse route. Nous avons vu que ce sont les besoins du secteur moderne – urbain ou semiurbain – de la population et non pas ceux du secteur traditionnel qui conduisent à la surexploitation des réserves de bois.

Mais l’utilisation – ou la non-utilisation – des cuiseurs solaires présente encore un autre aspect. « Ce sont les femmes qui sont le plus sévèrement touchées par le manque de bois, par-ce-que c’est à elles de trouver une so­lution. Les stratégies ménagères peuvent répercuter sur l’état de nutrition, puisque la disponibilité de combustibles affecte les habitudes de cuisine et la disponibilité des aliments » [WHO/INT, Environmental health informa­tion[12]]. C’est à juste titre que Qaim [1996, 21] fait remarquer que« les femmes devraient être la population cible de la propagation des cuiseurs solaires … les avantages pour les femmes sont souvent négligés. Si les femmes pouvaient décider, les cuiseurs solaires auraient plus de chances ».

Je ne peux que souligner cette remarque de Qaim d’àprès mes propres ex­périences. En décembre 1999 j’accompagnais une équipe de l’APFG (l’Association pour la Promotion des Femmes de Gaoua), qui s’attache a promouvoir les cuiseurs solaires, à des démonstrations publiques de cuisine solaire à un certain nombre de marchés de la province du Poni, la région où j’avais travaillé en 1972-75. Toutes les sept participantes utilisent un cui­seur solaire à la maison, adapté aux besoin d’une famille (la marmite com­prend 8 litres). Les membres de l’APFG ont accès à un mini-crédit pour l’achat d’un cuiseur solaire. Dans leurs « campagnes de sensibilisation » elles profitent de leur expérience comme utilisatrices et la valorisent.

Lors de ces déplacements, j’ai eu l’occasion de faire des observations intéressantes. Entre les paysans non encore influencés par l’école ou la té­lévision, il y avait de vieilles femmes qui supposaient qu’une cuisson sans feu ne pouvait que relever de la sorcellerie. D’autres croyaient qu’on vou­lait les tromper, et qu’il devait y avoir un feu caché, rendu invisible. Cela ne les empêchait pas de goûter les aliments préparés de la sorte. Un point positif pour elles fût l’absence de tout goût de fumée. J’aurais plutôt crû que cela pourrait être considéré comme un désavantage.

Un intérêt plus immédiat et concret fût exprimé surtout par des fonctionnaires et des gens appartenant au secteur moderne, même vivant à la campagne. C’est compréhensible, puisque, dans cette couche de la po­pulation, les femmes ont souvent un emploi, et n’ont pas le temps de ra­masser du bois, ce qui est une occupation féminine dans la région. Plu­sieurs personnes avait déjà vu des cuiseurs à la télévision. Cette couche sent la montée des prix du bois et du charbon de bois le plus douloureuse­ment. Ce qui est en dessous de la marmite, le combustible, coûte souvent autant ou plus que ce qui est dedans. Par conséquent, c’est ici qu’existent les plus grandes chances de diminuer les dépenses pour les combustibles et donc des possibilités et éventuellement des dispositions à investir.

Bien sûr, les cuiseurs solaires ne se propagent pas – ou pas encore – d’eux-mêmes. Pour cela, ils sont encore trop chers. Ainsi, pour un cuiseur du type Bamako, il faut payer 92.000 FCFA, et un jeu complet comprenant un pa­nier thermos (bitatoré), une bouteille de gaz et un réchaud (pour les jours de peu de soleil), le coût s’élève à 138.500 FCFA. Mais il est intéressant d’analyser, comment le succès partiel a pu être obtenu. En été 1997, la pré­sidente de l’APFG a eu l’occasion de visiter l’Allemagne et de connaître les cuiseurs solaires ainsi que d’autres instruments de technique solaire, comme des lampes photovoltaïques. Plus tard, au moment de l’arrivée des deux premiers cuiseurs solaires à Gaoua, le terrain psychologique était déjà bien préparé. On en convint, que les cuiseurs devraient être loués à la jour­née pour une petite somme. Cette possibilité fût surtout utilisé par des femmes, qui gagnaient leur vie en faisant marcher un restaurant. De la sorte, elles avaient l’occasion – sans investissement préalable – de faire leur expérience de la technique et d’ estimer – même de calculer – le po­tentiel d’économie de bois et donc de réduction des coûts. 

Le placement du cuiseur dans un restaurant est une bonne publicité, étant donné que les clients le voient et posent des questions concernant le fonc­tionnement et l’utilité. Les clients appartiennent en grande partie à la cou­che des fonctionnaires, soit des gens ayant adopté partiellement le mode de vie des Européens, et qu’on appelle « tubabulamogow »  en langue Jula (Dioula). Cela veut dire qu’ils mangent trois fois par jours, avec le repas principal à midi, à la différence des ruraux, qui ne mangent que le soir. Les revenus du restaurant servent à couvrir les frais de location du cuiseur ou au remboursement du crédit.

Entre-temps, une enquête par un membre de l’APFG (Youl Ini) a révélé que les propriétaires de restaurants souhaitent une capacité plus importante des marmites, soit 30-50 litres à la place de 8. Mais les cuiseurs utilisés (type Bamako) ne sont pas conçus ni adaptables à des marmites de cette taille, qu’il s’agisse du rendement thermique ou de la stabilité. Une solution pourrait être une technique différente (cuiseur utilisant un échangeur de chaleur) ou un cuiseur à foyer fixe (type Scheffler). Mais ces solutions sont encore trop chères pour les associations de soutien en Allemagne. Ce qui reste, c’est la promotion de la cuisson solaire dans les familles et, éven­tuellement, d’autres applications commerciales. Un problème majeur est le coût d’achat encore trop élevé.

Un point qui facilite l’adoption des cuiseurs solaires est l’habitude de faire la cuisine dehors. Le mode de construction traditionnel – sans étage – et la largeur des cours s’y ajoutent. C’est seulement en cas de pluie ou gros vent qu’on cuisine dans les maisons, ce qui comporte beaucoup d’inconvénients à cause de la fumée.

Des progrès dans l’utilisation des cuiseurs dans les familles supposent des campagnes, pour familiariser la population avec la technique, le manie­ment, les avantages,  les inconvénients et les précautions de sécurité. Pour cela faire, il faut avoir des moyens financiers à disposition. Les organisa­tions de soutien en Allemagne ont compris cela. L’organisation de ces campagnes relève des organisations de base, surtout féminines. L’importance de ces campagnes et du service après-vente (ou après-remise) fût mise en évidence par le fait que le personnel de l’École Nationale de Service Social (ENSS), également à Gaoua, n’avait pas mis ses cuiseurs solaires en service. C’est seulement après les démonstrations de cuisine solaire de la part de l’APFG qu’on a commencé à s’en servir.

En ce qui concerne la technique, elle doit être davantage adaptée aux be­soins des utilisatrices. Ceci suppose un échange continu entre les utilisatri­ces et les constructeurs. Un inconvénient du type de cuiseur utilisé est le fait qu’il ne possède qu’un seul foyer (bien qu’un feu ouvert n’en ait pas plus). Les mets usuels, d’autre part, comportent deux composantes, le tô (ou riz) et la sauce, qui ne peuvent pas être préparés en même temps. Mais il est possible de compléter la cuisson dans le panier thermos. Un nouveau type de cuiseur (papillon, butterfly) – pas encore utilisé à Gaoua – pourrait amener une amélioration, permettant de placer deux ou trois marmites de taille différente en même temps.  Le prix du type papillon s’élève à 115.000 FCFA.

Le danger de dommage pour les yeux dû aux cuiseurs à concentration.

Le type papillon diminue aussi le danger d’éblouissement, étant donné qu’en direction du regard de la cuisinière il n’y a pas de surfaces qui reflè­tent. À Gaoua, quelques cuisinières ont pris l’habitude de porter des lunet­tes de soleil. Pour éviter l’éblouissement, il est aussi important de choisir un type de cuiseur avec un foyer de concentration assez bas. La géométrie du paraboloïde doit être préservée; les déviations diminuent le rendement et comportent un risque pour les yeux. Pour cette raison, la qualité du produit doit être garantie.

En médicine du travail, on connaît l’irritation douloureuse des yeux provo­quée par la flamme lors la soudure de pièces métalliques, et contre les­quelles les soudeurs doivent se protéger. On peut supposer, que les effets possibles des réflexions du cuiseur touchant l’oeil sont comparables. On sait également, que le rayonnement de chaleur, par exemple dans les fonde­ries d’acier, peut conduire à une cataracte. Pour cette raison, il faut prendre des précautions. Il convient de ne pas oublier que le feu ouvert comporte des risques de brûlures pour les enfants et les épileptiques, et de voir les risques des cuiseurs solaires en perspective.

L’environnement social et économique.

La production et la vente des cuiseurs solaires ne doit pas être comprise comme une activité de développement commercial dans le sens de la mon­dialisation et de la croissance économique, mais plutôt de conservation du tissu social et écologique. Si l’on accepte les conclusions des chercheurs allemands auteurs du mémorandum d’octobre 2000 concernant la réforme de la politique allemande visant l’Afrique, la plupart des pays d’Afrique n’ont de toute façon pas de chance de rattrapage dans le sens d’une politi­que économique dirigée vers l’exportation. Le Burkina, d’après ces auteurs, compte parmi les pays à revenu faible avec peu de chances de développe­ment. Sous le point de vue politique, les savants constatent un « besoin croissant de prévention » au Burkina.

Pour les pays qui se trouvent dans une telle situation, les auteurs réclament des efforts pour arriver à une « stabilité structurelle, qui n’empêcherait pas les transformations dynamiques, mais qui devrait les promouvoir et in­fluencer positivement »

Les cuiseurs solaires pourraient y contribuer, d’autant plus, qu’ils ne se consomment pas comme le gaz et le kérosène, ou alors l’éthanol-gel. Ce qui pourrait leur conférer, dans l’optique de la population, un caractère comparable à des objets comme les bicyclettes, la radio, les machines à coudre, les frigidaires, ou même les dépôts en banque (appelé « asset » en anglais), et rendre la population ainsi moins vulnérable vis-à-vis de la montée des prix des combustibles. Fofack, Monga et Tuluy [2001], dans leur étude sur la pauvreté au Burkina Faso, soulignent la relation inverse entre la pauvreté et la possession de ce genre de biens (assets). 

La technique de production des cuiseurs solaires se prête le plus facilement à la confection artisanale ou petite-industrielle, compatible avec le secteur informel de l’économie. Même en Chine on préfère la production des cui­seurs solaires sur le mode artisanal ou de petite industrie[13]. Au Burkina Faso, les cuiseurs sont produits par l’Association pour la Production et l’Exploitation de l’Énergie Solaire (APÉES) à Ouagadougou.  APÉES ainsi que les associations de femmes qui utilisent ces cuiseurs solaires, sont ai­dées par plusieurs groupes en Allemagne : « Solar Global e.V » (Jülich),  „Sonnenenergie für Westafrika e.V.“ (Ettlingen) et « Bioenergie Sonne Wind e.V. » (Bingen).

Kuhnke et ses co-auteurs prévoyaient en 1990 que, dans nombre de ré­gions, l’utilisation de l’énergie solaire serait bientôt une des options res­tantes pour préparer un repas chaud. Ceci devient de plus en plus réalité. D’autre part, les cuiseurs solaires ne pourront jamais complètement rem­placer le bois. Ce n’est pas nécessaire. Mais on ne peut pas se passer des cuiseurs solaires quand il s’agit de retrouver une balance entre la produc­tion (l’accroissement annuel en matière ligneuse) et la consommation. Les énergies d’importation ne peuvent pas jouer ce rôle : les prix fluctuants et montants, les coupures d’approvisionnement  en  témoignent. D’ailleurs, en ce qui concerne le gaz, l’acceptation n’est pas assurée d’emblée, comme l’a montré le « Programme Gaz » de l’union Européenne  [Minvielle 1999, 64, 71]. Il faut ajouter que les « stratégies de réduction de la pauvreté » pour­raient conduire, en cas de succès, à ce que les moyens obtenus soient de nouveau absorbés par les prix d’énergie domestique qui montent. J.-P. Minvielle cite le „Rapport Mondial sur le Développement dans le Monde 1980-1996“ [1996], selon lequel l’idéal serait que les réformes écono­miques avec leur volet d’augmentation des prix soient accompagnées de paiements compensatoires aux pauvres [1999] ».

La Synthèse du Cadre Stratégique de Lutte contre la Pauvreté (CSLP) de septembre 2000 du Gouvernement du Burkina Faso est basée sur la crois­sance du secteur moderne. Une telle croissance de 5 % environ annuelle­ment existe bien depuis la dévaluation du FCFA en 1994, mais, en même temps, la pauvreté de larges couches de la population s’est accrue. Fo­fack, Monga et Tuluy [2001] constatent dans un document de recherche de la Banque Mondiale: „Dans un contexte de taux de croissance élevés et de pauvreté très répandue, les bénéfices de la croissance et leurs effets sur le bien-être de la population à travers les régions économiques et pour les dif­férents groupe socio-économiques deviennent une question clé d’importance politique ».

C’est probablement à cause de cela que le Ministère de l’Economie et des Finances admet que «la stratégie de réduction de la pauvreté est assez vo­lontariste ». Le problème de l’énergie n’y est pas mentionné, sauf indirec­tement et par une formule vidée de sens (généraliser et renforcer la gestion durable des ressources naturelles). Cette gestion durable n’existe simple­ment pas en ce qui concerne le bois au Burkina Faso, donc, dans l’immédiat, il s’agit de l’initier plutôt que de la renforcer, et elle ne sera pas possible sans un changement profond d’esprit et de technique. Un tel chan­gement n’a pas été conçu ou envisagé par les multiples organismes d’état, inter-états ou internationaux impliqués dans les problèmes de l’énergie, de la déforestation et de la désertification, et encore moins lancé.

La situation est semblable dans d’autres pays africains et même du monde. Une publication de l’Agence Canadienne de Développement International (ACDI) montre que 55 % du bois coupé dans le monde est utilisés directe­ment ou indirectement (Charbon de bois) comme bois de chauffe. En Afrique ce pourcentage est largement dépassé : Samir Amous[14], dans une étude sur le rôle de l’énergie de bois en Afrique publiée par la FAO, compte que 92 % du bois utilisé en Afrique servent comme combustible. Et cette ressource devient de plus en plus rare, comme l’ont montré de nom­breuses communications lors de la quatrième conférence internationale sur la lutte contre la désertification, tenue à Bonn en décembre 2000, voir p.e. Mgendi, Catherine, [2000, site de la Fondation Allemande pour le Déve­loppement International, DSE][15], et Mulenga, Mildred, [2000].

Le changement d’esprit nécessaire.

Que les couches de population déconnectées du marché mondial ne soient pas en mesure de s’approvisionner en énergies importées (comme le gaz, le kérosène et l’éthanol-gel) devrait être facile à comprendre. Malheureuse­ment c’est justement ceci qui est la conséquence du Cadre Stratégique de Lutte contre la Pauvreté mentionné plus haut, étant donné que la solution du problème est recherchée exclusivement à travers les investissements et l’augmentation des exportations : « La stratégie vise à faire du secteur privé le principal moteur de la croissance par la création d’un environnement fa­vorable à l’investissement privé, notamment une politique de libéralisation de l’économie et l’intensification des réformes visant la création d’un cadre juridique sécurisant et stable pour l’investissement privé » .

Mais, au moins sur le plan international, il y a des idées divergentes, et il est possible qu’il y ait un nouveau paradigme qui se prépare. Ainsi, d’après Paul Lachance, dans un forum de discussion à l’internet de l’OCDE/Club du Sahel, l’idée du développement par la croissance du secteur moderne est trop restreinte. Par contre, le secteur informel, désigné par Lachance à juste titre comme « l’économie réelle » devrait être pris en considération. Il mentionne deux types de croissance, qui devraient exister côte à côte. Même l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) semble maintenant reconnaître l’importance du secteur informel. Ainsi, dans une communication de presse (« Burkina Faso, novembre 1998 ») il est dit que le secteur informel dynamique contribue pour 25 % du produit national brut et même pour 80 % des emplois (agriculture exceptée). On peut en conclure, que le secteur informel a ses points forts dans la création et le maintien des emplois, tandis que le secteur moderne est fort dans l’accumulation de capitaux.

Le manque de liaison avec le marché mondial ne signifie pas qu’on tourne le dos à la technique, et encore moins quand il s’agit de techniques alternatives en matière d’énergie. Arturo Escobar [1995], qui critique sévèrement « l’industrie du développement », écrit: « Une chose est certaine, les modèles locaux n’existent pas dans un état pur, mais en hybridations[16] complexes avec les modèles dominants ». Mais il nous met en garde: « Le modèle de l’économie familiale persiste en marge, où le modèle de la coopération (qui représente l’économie du marché), n’a pas pu s’imposer. Le modèle de l’économie familiale et celui de l’économie du marché se trouvent dans une situation de contraste (de contre-point), le dernier essayant toujours de s’incorporer le contenu du premier ».

Dans cette relation hybride les pays donateurs et leurs organisations doivent se restreindre. « Une bonne pratique requiert moins d’intrusion » [Naudet 2000]. À la place, Naudet recommande d’avancer par tâtonnement et bricolage, sans programme détaillé établi au préalable. Lachance [1998] émet des propositions similaires. Il est à douter que « l’industrie du développement » soit capable et veuille s’y conformer. Elle devrait agir contre ses propres intérêts.

Malgré tout : l’idée d’hybridation semble avoir beaucoup d’avantages, en particulier, s’il s’agit de mettre à profit des techniques alternatives. La difficulté consiste à enchâsser la technique dans le contexte local et social [Latouche 1998, 189]. Escobar suit le même sentier : « au lieu de chercher de grands nouveaux modèles ou stratégies, ce qu’il faut, c’est l’exploration de représentations alternatives et pratiques dans des situations concrètes locales, en particuliers à l’état hybride, ainsi qu’une action collective et une mobilisation politique ».

En juillet 2001 a eu lieu un atelier du CILSS, Comité Inter-état de Lutte contre la Sécheresse au Sahel. Le but était de définir un plan d’énergie domestique (PLED) pour sortir de la crise. On ne sait pas encore, si la GTZ[17] allemande, qui a un projet de cuiseurs solaires en Afrique du Sud, a pu introduire le sujet dans les délibérations. 

Peut-être le CILSS a appris quelque chose. En 1998 encore, une évaluation[18] des divers « Plans d’Action Nationaux » (PAN) par le Club du Sahel, le partenaire du CILSS du coté des pays donateurs, arrivait à la conclusion : « En aucun cas l’établissement du PAN n‘a été basé sur une appréciation solide et rationnelle de la situation existante, profitant des leçons apprises par l’expérience en recherche, financement, approches innovatrices et manière de construire un partenariat effectif ».

Un changement d’esprit est nécessaire aussi du coté des ONGs du Nord, qui ont trouvé du reste des approches très utiles, p.e. le Groupe de Développement des Technologies Intermédiaires[19], qui, dans une prise de position[20] au Rapport 2001 sur le Développement Humain du PNUD, s’exprime ainsi : « Même une technologie appropriée, là ou elle n’a pas été développée en association avec les utilisateurs, va faire faillite. Les cuiseurs solaires sont des alternatives simples, efficientes et bon marché vis-à-vis des combustibles traditionnels à base d’énergie de biomasse. Mais ils n’ont pas été acceptés par les gens locaux – dont le travail dans les champs et marchés ne permet pas de passer les heures de soleil à faire la cuisine ».

La formule « travail dans les champs » laisse entrevoir que les auteurs ciblaient la population rurale, à la place des citadins, qui ont une consommation de bois beaucoup plus importante et croissante, et qui d’autre part, peuvent et doivent penser à des alternatives pour des raisons économiques. L’erreur était donc déjà présente dans la sélection de la population, faite d’emblée de l’extérieur.  

La confection de cuiseurs solaires par les Africains pourrait être une situation comme elle a été imaginée par Arturo Escobar, et elle pourrait être une contribution au dépassement de la marginalisation du Sud.


 

Tab. 1

 

Lieu

 

Province

Population en 1985

Population en 2001

Accroissement en %

Taux d’accroissement annuel moyen en %

Banfora

Comoé

35,0

95.0

271

6,4

Bobo-Dioulasso

Houet

231,2

474,3

205

4,6

Bogandé

Gnagna

12,4

29,3

236

5,5

Boulsa

Namatenga

7,1

9,1

128

1,6

Dédougou

Mou Houn

21,0

35,7

170

3,4

Diapaga

Tapoa

20,0

43,2

216

4,9

Diébougou

Bougouriba

3,7

5,1

138

2,0

Djibo

Sanmatenga

4,8

7,0

146

2,4

Dori

Séno

7,1

13,6

192

4,1

Fada N’Gourma

Gourma

20,3

54,6

269

6,4

Gaoua

Poni

7,3

10,7

147

2,4

Gorom-Gorom

Oudalan

4,2

7,0

167

3,2

Kantschari

Tapoa

 

20,2

 

 

Kaya

Sanmatenga

25,8

50,8

197

4,3

Kombissiri

Bazéga

25,8

42,3

164

3,1

Kongoussi

Bam

3,2

3,8

118

1,1

Koudougou

Boulkiemdé

51,9

124,4

240

5,6

Koupéla

Kouritenga

6,6

15,4

233

5,4

Léo

Sissili

8,1

21,0

259

6,1

Manga

Zoundweogo

1,9

4,0

211

4,8

Nouna

Kossi

6,0

12,1

202

4,5

Orodara

Kénédougou

7,1

11,9

168

3,3

Ouagadougou

Kadiogo

442,2

1236,9

280

6,7

Ouahigouya

Yatenga

38,9

74,0

190

4,1

Naouri

3,6

6,0

167

3,2

Réo

Sanguie

2,9

4,4

152

2,6

Tenkodogo

Boulgou

22,8

55,8

245

5,8

Tougan

Sourou

14,1

18,2

129

1,6

Yako

Passoré

12,8

13,7

107

0,4

Ziniaré

Oubritenga

8,4

11,6

138

2,0

Zorgo

Ganzourgou

4,2

8,0

190

4,1

 

Population des villes et agglomérations au Burkina Faso, en milliers,

Source: „Cities and places in Burkina Faso“: The World Gazetteer, 2001 (modifié, les deux dernières colonnes sont calculées par l’auteur de cet article)

 


 

Literatur

Amous, Samir, « The Role of Wood Energy in Africa », Forestry Department, Food and Agricultural Organization of the UN (site internet de la FAO, sans année).

Chazine, Henri, „Afrique de l’Ouest: Rencontres et Réflexions“, Unasylva Nr. 150, 1985.

Engel, Ulf, Robert Kappel, Stephan Klingebiel, Stefan Mair, Andreas Mehler, Siegmar Schmidt: „Memorandum zu Neubegründung der deutschen Afrikapolitik. Frieden und Entwicklung durch strukturelle Stabilität“, Berlin, Oktober 2000

Compaoré, A. und J. Kaboré (1999) „Les ressources forestières et les plantations forestières du Burkina Faso“, Programme d’évaluation des ressources forestières,  1999).

Cour, Jean Marie, und Serge Snrech, “Preparing for the Future. A Vision of West Africa in the Year 2020, West Africa Long-Term Prospective Study”, OECD/Club du Sahel, Paris 1998.

Elwert, Georg, (1983) “Der entwicklungspolitische Mythos vom Traditionalismus“, In: Goetze, Dieter und Weiland, Heribert (1983) (1983): „Soziokulturelle Implikationen technologischer Wandlungsprozesse“, Sozialwissenschaftlicher Studienkreis für internationale Probleme (SSIP), Saarbrücken.

Escobar, Arturo, „Encountering Development, The Making And Unmaking Of The Third World“, Princeton 1995.

Fofack, Hippolyte, Monga, Celestin, and Tuluy, Hasan, “Household Welfare and Poverty Dynamics in Burkina Faso”, Policy Research Working Paper, The World Bank, Africa Region, WPS 2590, 2001

Freudiger, Patrick, und Oussouby Touré, Implementation of the United Nations Convention to Combat Desertification, Points for Discussion on the Process in seven Countries in the Sahel”, 1998, Club du Sahel 1998

Gorse, Jean, „Desertification in the Sahelian and Sudanian zones of West Africa“, Unasylva Nr. 150, 1985

Hankins, Mark, „Nachhaltig ignorant: „Der Solarkocher im Entwicklungseinsatz. Eitel Sonnenschein“, Blätter des Informationszentrums Dritte Welt (3izw) 97, Nr .6: 45.

Ki-Zerbo, Jacqueline, „Women and the energy crisis in the Sahel“, Unasylva, 133, 1985.

Kuhnke, Klaus, Reuber, Marianne & Schwefel, Dieter, (1990), Solar Cookers in the Third World, Hrsg. Deutsches Zentrum für Entwicklungstechnologien (GATE) der GTZ, Braunschweig/Wiesbaden.

Latouche, Serge, “L’Autre Afrique. Entre don et marché », Paris 1998.

Mgendi, Catherine, « Fuel Crisis Aggravates Desertification », Daily Nation, Nairobi/Kenia, präsentiert auf dem Workshop des « Global Cooperation Council » vom 11.-12. Dezember 2000 in Bonn.

Ministère de l’Économie et des Finances, Burkina Faso, « Synthèse du Cadre Stratégique de Lutte contre la Pauvreté », Ouagadougou, DGEP, Septembre 2000.

Minvielle, Jean-Paul, (1999), « La question énergétique au Sahel », Collection Économie et Développement, Éditions Karthala, Paris.

Mildred Mulenga, « Le bois de chauffe détruit les forêts zambiennes », Panafrican News Agency, December 18, 2000.

Nachtigal, Gustav, « Sahara und Sudan », Leipzig 1879-1881, photomechanischer Nachdruck Graz 1967

Naudet, Jean-David, « Finding problems to fit the solutions », OECD/Club du Sahel, London 2000

Organisation Mondiale du Commerce, Communiqué de Presse :« Burkina Faso: novembre 1998, « La Poursuite Des Réformes De Libéralisation Au Burkina Faso Devrait Soutenir La Croissance Économique »

Qaim, Martin, (1996), Solarkocher in Entwicklungsländern, Erfahrungen, Grenzen, Potentiale, Bonn, Bundesministerium für Wirtschaftliche Zusammenarbeit, BMZ Aktuell.

Sauer, Hans Dieter, (2000), „Wunsch und Wirklichkeit. Das begrenzte Potential von Solarkochern“, epd-Entwicklungspolitik Nr. 3: 23-25.

United Nations Centre for Human Settlements (Habitat), Presse Release, Review by Rasna Warah, on “Cities in a Globalizing World,: Global Report on Human Settlements 2001), London 2001.

 

 

 


 

[1] Selon l’Organisation Mondiale du Commerce les exports du Burkina ne couvrent que la moitié des imports, d’oû un déficit permanent (communiqué de presse Novembre 1998).

[2] Il n’est pas possible de traiter ici des changements de climat,  p.e.  du déplacement des isohyètes vers le sud,  voir l’Atlas „Burkina Faso“ [Jeune Afrique, Paris 1998]. Les changements correspondent à une diminution de la quantité de pluie. 

[3] „concentrated demand around urban centres (particularly N’Djamena) is leading to localized desertification and a decline in soil fertility” [ World Bank  1999, Chad – Household Energy Project, 1996,  Project ID:  TDPA532; www.worldbank.org/pics/pid/td532.txt ]

[4] Banque Mondiale: Burkina Faso Sustainable Energy Management Project/ AIJ Component, 1999,  Project ID: BF-PE-52442, www.worldbank.org/pics/pid/bf52442.txt

[5] Direction Nationale de la Conservation de la Nature (DNCN), d’après  la Panafrican News Agency (Dakar) du 02.Oktobre 2000,  „ :  

[6]Global Statistics Annual Deforestation (%  p.a),  http://www.planetgeog.com/upload/stats/for.htm

[7]un groupe consultatif nommé par le président. Source:  www.ces.gov.bf/Travaux/povi.htm

[8] The Role of Wood Energy in Africa, Wood Energy for Tomorrow (WETT),  Executive Summary, Quelle http://www.fao.org/docrep/x2740e/x2740e00.htm

[9]  au Burkina Faso, comme dans d’autres pays de la région, on trouve des craintes superstitieuses, selon lesquelles la plantation d’un arbre entraînerait la mort de la personne qui l’a planté. Il est curieux que cette croyance ne soit pas thématisée, même dans les campagnes de vulgarisation pour la plantation d’arbres.

[10] Burkina Faso Sustainable Energy Management Project/ AIJ Component, ID BF-PE-52442, 1999 (http://www.worldbank.org/pics/pid/bf52442.txt)

[11] Le rapport de la Banque Mondiale „Energy by Region: A Brighter Future? Energy in Africa’s Develop­ment“ constate que, dans les pays en développement, les gens dépensent en moyenne  12 % de leurs revenus pour l’ énergie, contre 2 % dans les pays de l’OCDE. D’après Douglas Barnes dans un article intitulé „energy issues“ (The World Bank Group) Nov. 1995 ce seraient même 15-22 %..

[12] An Anthology on Women, Health and Environment: Domestic Fuel Shortage and Indoor Air Pollution, Summary of the work of: Cecelski E., “Energy and rural women’s work: Crisis, response and policy alternatives”, International Labour Review, 1987.

[13] “Sun Seek” Concentrating Solar Cooker, Beijing Newline Co. LTD, zit. nach Integration GmbH, Frankfurt 1997.

[15] voir site de la „Fondation  Allemande de Développement International“ („Deutschen Stiftung für Internationale Entwicklung“, abbr. DSE).

[16] « hybride » signifie héréditairement mélangé

[17] Gesellschaft für Technische Zusammenarbeit

[18] Patrick Freudiger and Oussouby Touré, “Implementation Of The United Nations Convention to Combat Desertification, Points For Discussion On The Process in Seven Countries In The Sahel”, Claub du Sahel, Nevember 1998.

[19] Intermediate Technology Development Group (ITDG), base à Londres